Le 19 mars est une date très importante en Bolivie : c’est le jour de la fête des pères. Partout, le pays est en liesse. Les vitrines des magasins se décorent à l’effigie du « pilar de la familia », les écoles se lancent dans de grandes festivités et les enfants – trépignant d’impatience – répètent inlassablement les pas de danse, pièces de théâtres et autres poèmes appris par cœur pour l’occasion.
Dans la petite ville de San Ignacio, les enfants de l’orphelinat « Nostres Pequeños Hermanos » (NPH) ne sont pas en reste. Le 19 mars, pour eux, ce ne sont pas les papas qui sont à l’honneur, mais leurs « tios ». Leurs oncles.
Car, dans cet établissement haut en couleurs, enfants comme adultes, employés comme bénévoles, tous ont à cœur de recréer la chaleur d’une famille unie. La question du sang ne se pose pas : dès leur arrivée, ils sont frères et sœurs, « tios » et « tias ». Les volontaires viennent des quatre coins du monde, mais, bien qu’ils aient la peau blanche et ne parlent parfois qu’un espagnol approximatif, quelques jours suffisent pour qu’ils soient considérés comme partie intégrante de la grande fratrie.
Chez NPH, en somme, ce sont les enfants qui adoptent les adultes. Et le jour de la fête des pères, c’est le plus naturellement du monde qu’ils se choisissent un papa. Un honneur, dont « tio Antonio » n’a pas été écarté !
Les festivités commencent tôt le matin. Chez les maternelles, les enfants ont mis au point un spectacle digne des plus grandes fêtes de l’école, suivi d’une avalanche de cadeaux : mugs en plastique, cravates en carton et porte-clés pailletés avec application. Dans les rangs, les papas sont boliviens, mais aussi français, allemands ou américains.
Du côté des plus grands, le lycée a organisé une course de 5 kilomètres à travers la ville. Cette fois, les papas sont aussi bien mis à l’honneur qu’à l’épreuve : pour les 800 derniers mètres, ils sont appelés à rejoindre les coureurs et, c’est à deux qu’ils se doivent de franchir la ligne d’arrivée.
Aux côtés des papas de sang, ceux d’adoption prennent leur mission très au sérieux. Antoine est dans les starting-blocks, prêt à s’élancer auprès de Maria pour le sprint final.
Déjà les premières silhouettes se découpent à l’horizon. Des deux côtés, on plisse les yeux, on fronce les sourcils, on essaye de détecter des traits familiers. Moment de tension ultime. Il faut retrouver sa moitié, sans pour autant se laisser distancer. Jusqu’à ce qu’enfin les pères rentrent dans la danse, tendant parfois une bouteille d’eau à leur protégé, leur empoignant fermement la main, riant tous deux de s’être retrouvés, émus de partager la même épopée. Qu’ils s’appellent ou non « papa », l’essentiel c’est qu’au bout du chemin, ils sont là.
Charlotte.